Un projet hybride mêlant Twitter, archives et … vélo

1- Objectifs du Tour : valoriser les femmes et les hommes d’un grand groupe et son histoire

A- Un important dispositif commémoratif existant

Saint-Gobain fête cette année ses 350 ans et célèbre cet anniversaire depuis le 9 janvier 2015 avec de nombreux projets multicanaux pour toucher un large public. Conscient de l’importance de son patrimoine historique et industriel, le Groupe a souhaité placer au centre de sa démarche le GIE Saint-Gobain Archives, en particulier sur les projets du livre Saint-Gobain ; 1665-2015 ; le passé du futur et le site Saint Gobain 350 ans. Ce dernier présente une exposition numérique composée d’une frise historique, divers portraits, des petites vidéos retraçant la construction du groupe ou encore d’une reconstitution 3D de la Manufacture des Glaces . Le site corporate de Saint-Gobain permet, quant à lui, d’avoir une vision à 360° des différents événements de l’année : pavillons voyageant à travers le monde, jeu pour smartphones, etc.

Exposition numérique

B- Une proposition émanant de collaborateurs motivés par une aventure humaine particulière

En parallèle de ces projets pilotés par les différentes directions de Saint-Gobain, un collaborateur anglais lance l’idée en mars 2014 de réunir des cyclistes de plusieurs pays afin de rejoindre le village de Saint-Gobain et de célébrer ainsi les 350 ans du groupe. De nombreux collaborateurs manifestent tout de suite un fort engouement pour ce projet, aussi bien en France qu’en Grande-Bretagne ou aux Pays-Bas. Il faudra plusieurs mois d’organisation aux bénévoles pour faire de ce projet de tour cycliste une réalité. Au programme, plusieurs jours de randonnée à vélo, trois parcours différents avec pour point de rassemblement le centre des Archives du groupe à Blois le lundi 13 juillet 2015.

C- Un projet mêlant exploit sportif et mémoire commune

De la même façon que l’on peut suivre le Tour de France avec le #TDF2015, Saint-Gobain a eu l’idée de suivre les cyclistes Saint-Gobain sur Twitter durant l’ultime journée du parcours et de faire partager cette aventure aussi bien à ses collaborateurs qu’au grand public. Limonade & Co a ainsi été sollicitée pour couvrir cet événement et a proposé un live-tweet hybride, permettant de suivre l’épreuve elle-même, de connaître ces bénévoles du Groupe et de faire découvrir l’histoire de Saint-Gobain
Il s’agissait de croiser la grande et la petite histoire en 140 caractères, à savoir : traverser les époques de Saint-Gobain en la mettant si possible en parallèle avec les lieux traversés, et de mettre en avant l’exploit sportif individuel au service du collectif puisque les cyclistes se réunissent symboliquement dans le lieu de conservation de la mémoire commune de Saint-Gobain, ses Archives.

2- Stratégie retenue : live-tweet et storytelling

Le live-tweet ouvre de nouvelles possibilités pour la valorisation des archives, notamment en ayant recours à la technique du storytelling. Cette technique de communication est, dans ce projet, tout particulièrement bien adapté puisqu’il permet ainsi d’illustrer le Tour en direct tout en racontant l’histoire du Groupe en s’appuyant sur ses documents d’archives. Le parcours emprunté devient du coup prétexte à la narration de plusieurs histoires.

De nombreuses agences de communication ont de plus en plus recours au storytelling, mixant ainsi réseaux sociaux et archives. Les communicants ont perçu toute la valeur ajoutée et tout le potentiel d’un document d’archives, afin d’imaginer et de construire parfois un récit de vie. Le document vient apporter plus d’épaisseur, de sens, ou de véracité à ce récit. Le musée de la Grande Guerre de Meaux a, par exemple, ainsi raconté l’histoire de Léon Vivien, poilu de la Première Guerre mondiale à travers un profil Facebook. De la même façon, c’est à travers un autre compte Facebook fictif que l’on pouvait suivre le quotidien parisien sous l’Occupation nazie : celui de Suzon, une jeune fille de neuf ans.

3- Mise en oeuvre du projet : de la préparation de la trame de l’histoire au live du 13 juillet

A- Préparation du contenu:

Certains faits importants et anecdotes ont été sélectionnés dans l’histoire de Saint-Gobain pour être mis en avant dans le live-tweet. Pour cela, les frises historiques ont servi de repère, même si la principale source utilisée fût l’ouvrage de Marie de Laubier Saint-Gobain 1665-2015, Le passé du futur . Les droits des images du livre ayant auparavant été recherchés et négociés, leur utilisation sur Twitter en fut simplifiée et une sélection de ces images fût faite pour illustrer les tweets.
En effet, afin d’améliorer le référencement sur Twitter et le plaisir de lecture, la plupart des tweets furent accompagnés de photos.

B- Élaboration d’une grille de tweets

Afin de faciliter l’envoi des posts depuis la voiture-balai et permettre de mieux se focaliser sur les événements de la journée, un fil conducteur comprenant les tweets à caractères historiques a été préparé en amont de la journée. La grille alternait tweets historiques, portraits de cyclistes (Lyon, Pont-à-Mousson, Nantes, Pays-Bas, Grande-Bretagne), présentations des différentes enseignes du groupe ou encore des focus sur de grandes réalisations. A l’instar d’un chassé-croisé du peloton, il s’agissait de mélanger les genres afin de dérouler une histoire pouvant susciter à la fois l’attention de la sphère Twitter, de valoriser l’exploit humain et sportif de ces cyclistes mais aussi de souligner l’importance de ce groupe dans la société civile depuis plusieurs siècles (galerie des glaces de Versailles, verre Duralex, pyramide du Louvre, Grand Palais pour ne citer que les plus célèbres). Une petite part fût laissée à l’imprévu afin de garder un aspect spontané propre au live-tweet, même si le parcours fût examiné à l’avance pour que les tweets se rapportent le mieux possible aux paysages traversés.

Outre les thèmes à aborder durant cette journée, la question de l’éditorialisation des tweets a demandé une réflexion particulière. En effet, le tweet ne permet que 140 caractères et le hashtag #SaintGobain350 ainsi que la présence de photos monopolisaient déjà à eux seuls 35 caractères (une photo équivalent à 20 caractères). Réduit à environ 100 caractères, il fallait donc proposer un tweet suffisant pertinent et percutant pour retenir l’attention du lecteur en écrivant un texte relativement brut mais de qualité.

C- Live-tweet du lundi 13 juillet

Tout au long de la journée du lundi 13 juillet, les tweets ont été publiés en suivant un ordre prédéterminé, tout en y insérant des événements survenus lors de la randonnée (incident technique, anecdotes), des témoignages et réactions en direct de la part des cyclistes, ou encore des tweets visant à signaler différents monuments remarquables sur le parcours. En parallèle, des portraits de collaborateurs du groupe tournés la veille ont été téléchargés sur une chaîne Youtube pour assurer une meilleure qualité de diffusion. Ces derniers ont également été publiés au fil des tweets. A travers un questionnaire à la manière de Proust, comme “si votre expérience du Tour cycliste des 350 ans était un matériau ?”ou encore “qu’avez-vous appris sur vos collègues lors de ce Tour cycliste des 350 ?” , les cyclistes ont pu nous livrer leurs ressentis et nous expliquer leurs motivations, personnelles ou professionnelles, à prendre part à cet événement hors du commun. Il suffit de regarder quelques vidéos du départ et de l’arrivée pour comprendre que l’esprit d’équipe et la bonne ambiance étaient les maîtres mots de ce tour.

Autres exemples de tweets portant sur les célébrations des 350 ans du groupe ou sur des sujets plus anecdotiques comme le fameux verre Duralex qui a bercé notre enfance lors de repas agités à la cantine :

Si la préparation des tweets a été déterminante pour la réussite de cette journée, il est important de souligner qu’un live-tweet en extérieur doit tenir compte d’un autre facteur plus imprévisible à maîtriser : la couverture 3G ou 4G. En effet, le tour a traversé de nombreuses zones rurales dans lesquelles la couverture réseau était limitée, ce qui a pu perturber l’envoi de tweets.

4- Des résultats encourageants

A- L’analyse statistique

Si le compte Twitter @saintgobainarc, ouvert deux jours seulement avant l’événement, ne réunissait qu’un petit socle d’environ 30 abonnés, ces derniers ont été particulièrement actifs en retweetant abondamment le contenu de Saint-Gobain Archives permettant au compte de s’enrichir de 20 abonnés supplémentaires.

Le tweet le plus partagé a été :

Au total, 177 tweets ont été envoyés par le compte pour plus de 17 000 impressions  en une journée.

Voici la répartition thématique des tweets envoyés tout au long de cette journée :

Répartition des tweets

Répartition thématique des tweets

La plupart des tweets comportait des images ou des vidéos, qu’elles aient été tournées sur le moment ou préparées d’avance pour les tweets historiques.

Le hashtag #SaintGobain350 a été inséré dans chacun des tweets diffusé, parfois complété directement par @saintgobain ou encore par des pseudos d’institutions visitées ou traversées par le Tour pour signaler le passage de l’événement et les inciter à retweeter.

B- Quels bénéfices pour le Groupe Saint-Gobain ?

Selon Pierre-André de Chalendar, Président-Directeur Général de Saint-Gobain, le Groupe “garde un certain “esprit de famille”, un sentiment d’appartenance fort et un attachement presque sentimental à [l’entreprise], qui perdure souvent bien au delà de [la] vie professionnelle” (Saint-Gobain 1665-2015, Le passé du futur, Marie de Laubier). Le Tour des 350 fût particulièrement représentatif de cet état d’esprit puisque, nous l’avons dit, il été imaginé par les collaborateurs de Saint-Gobain avec l’idée de se retrouver dans le lieu symbolique de leur mémoire commune : leur centre d’Archives.
De la même façon que le Tour a été pensé de façon extra-professionnelle, le projet s’est lui même déroulé en marge des célébrations institutionnelles liées aux 350 ans.
Ainsi, le projet de live-tweet fut l’occasion pour Saint-Gobain de montrer un Groupe uni, ouvert aux propositions de ses employés et enclin à communiquer de façon innovante pour mettre en avant cet “esprit de famille” cher à l’entreprise.

D’une autre part, l’utilisation de Twitter permet, nous le savons, d’élargir le public touché par une publication. En effet, différents types de followers ont ainsi rejoint le compte Twitter @SaintGobainArc : des institutions d’archives intéressés par la projet de live-tweet patrimonial, des cyclistes ayant connu le projet via le #TDF2015, différents collaborateurs du groupe (administration, service de communication, employés du GIE Archives ou occupant d’autres postes) ou encore les proches des coureurs. De cette façon, Saint-Gobain a été mis en avant sur le site de micro-blogging et différents publics ont ainsi eu connaissance de l’Histoire et des réalisations du Groupe.

Enfin, le projet a permis à Saint-Gobain de mettre en valeur son patrimoine de manière différente de ce qui avait été fait jusqu’ici. En effet, en complément du dispositif de commémoration numérique mis en place institutionnellement, le live-tweet autour du Tour des 350 a permis de mettre en lumière individuellement certains documents jusqu’alors présentés collectivement, de les réactualiser et enfin de les rendre accessibles à un plus grand public.

 

5- Conclusion: quels avantages les entreprises peuvent retirer à valoriser leur patrimoine via les réseaux sociaux ?

Le groupe Saint-Gobain, toujours en activité et fort de 350 ans d’âge, a bien compris l’importance de la valorisation de son patrimoine historique. Nous l’avons vu, un dispositif institutionnel important a en effet été mis en place pour la commémoration de cet anniversaire, et le choix a été fait de se concentrer particulièrement sur l’aspect numérique, notamment avec l’ouverture d’un site web consacré. En ce qui concerne la communication sur le Tour des 350 ans, le médium choisi fût différent. En effet, l’idée du projet provenant directement des collaborateurs du groupe, l’utilisation des réseaux sociaux pour faire partager l’aventure au grand public prit tout son sens.

Loin du site internet institutionnel, il s’agissait cette fois-ci pour Saint-Gobain de faire partager l’aventure humaine de ses collaborateurs, de montrer une façette différente de l’entreprise et de se rapprocher ainsi de son public. Le dispositif de commémoration s’imbriquait parfaitement dans cette idée puisqu’il s’agissait de la même façon de faire partager l’histoire de Saint-Gobain et de ses différentes filiales, et de faire ressortir ainsi l’aspect familial et soudé du groupe, tout en permettant à un plus large public de prendre connaissance de son histoire et de ses archives.

Ainsi, l’utilisation de Twitter permit de mélanger ces deux aspects, le présent à travers la promotion de cette aventure humaine et le passé, puisque les archives furent ainsi réactualisées et mises en avant. En outre, la création d’un compte Twitter @SaintGobainArc aida à faire exister pleinement le projet au sein du dispositif de commémoration déjà représenté par le #SaintGobain350 sur Twitter, et surtout de mettre en avant l’importance du GIE Archives Saint-Gobain dans la conservation de la mémoire du groupe. Par le biais de ce projet, le groupe Saint-Gobain eu donc l’occasion de mettre en avant l’aventure humaine de ses collaborateurs et leur implication au sein des commémorations, tout en en attirant un nouveau public et en réaffirmant son empreinte historique.

Comme Saint-Gobain, de plus en plus d’entreprises prennent conscience de la valeur de leur patrimoine industriel et veulent aujourd’hui le valoriser, ancrer leurs activités et leur histoire dans l’Histoire pour mieux se développer. Elles réalisent en effet que la mémoire de l’entreprise constitue son empreinte dans le présent. De nombreux groupes de l’industrie du luxe réutilisent par exemple régulièrement leurs images d’archives pour valoriser leurs produits actuels. La communication est alors basée sur la qualité de leurs produits et l’aspect historique de leur maison ; elles utilisent ainsi leur patrimoine comme un retour sur investissement afin d’inscrire leur action et leur influence dans la durée. De la même façon, le groupe Airbus met régulièrement en avant ses archives sur son compte Twitter, faisant souvent le parallèle entre un évènement actuel et une image plus ancienne : ainsi, le groupe réaffirme son histoire tout en communiquant sur ses réalisations actuelles.
L’utilisation des réseaux sociaux pour valoriser le patrimoine de l’entreprise est alors particulièrement judicieux puisqu’il permet d’actualiser les documents d’archives tout en les partageant à un plus grand nombre. En effet, l’instantanéité liée aux messages sur les réseaux sociaux est mis en perspective avec la longue histoire du groupe, et sa communication quotidienne se mêle à la valorisation du patrimoine sur une plus longue durée. L’entreprise fait ainsi la promotion de sa marque tout partageant son patrimoine : elle ancre alors son image simultanément dans le passé, le présent et le futur.